Une fois n'est pas coutûme, une petite review sur les monos de cette belle édition 2014 est de mise. Naturellement, je vais commenter en suivant le classement.
A noter que je vais suivre ici le même schéma critique que celui utilisé sur mes retours de la saga de l'été l'an dernier. C'est un peu formaliste, mais cohérent.
>
Bzz, réalisé par FalEn voyant le thème visuel de cette édition, je m'étais dis qu'on tomberait indéniablement sur quelqu'un qui exploiterait ce pare-brise moucheté. Pas manqué, avec ce
spot de prévention bien sympathique signé Fal.
Scénario : Pas de quoi prendre la mouche, on a bel et bien affaire à des insectes et à de l'humour de haut vol. Le concept, comme sa chute, étant certes classique et relativement prévisible, les dialogues sont bien écrits, rythmés, parsemés d'un humour de situation, dans un style fantaisiste propre à l'auteur tel qu'on le connaît. Simple mais efficace. Un humour...qui fait mouche.
Jeu d'acteur : Habitué à jouer des rôles multiples sur un même projet, on retrouve Fal et son talent pour manier le pitch et réussir à se faire vocalement passer pour les différents "personnages" de cette courte histoire. Dans le ton, avec une bonne intonation. Réussi, sans extravagance. A noter que le second acteur qui joue le
GPS est parfait dans son rôle.
Réalisation : Très peu de choses à dire sur la réalisation. C'est propre et dynamique, spatialisé. La gestion de la réverbération est très réussie, les éléments sonores soutiennent bien les situations. Le choix musical quant à lui est judicieux. On pourra éventuellement reprocher un manque de vent et de voitures qui passent dans le fond pour accentuer l'immersion de l'extérieure et de l'intérieure. Pour le reste, c'est du tout bon.
Conclusion : Fal signe ici un mono peu original, mais très sympathique. Un petit plaisir de trois minutes trente qui parlera indéniablement aux conducteurs vacanciers de tout horizon.
______
>
Bugs, réalisé par Grushkov & TuhkiAvez-vous lu la petite introduction sur le mono de Fal ? Non ? Lisez-là et faites la même constatation ici. Pare-brise > moucheté > exploitation. Et pourtant, dites-vous que malgré cette ressemblance, ce mono sait tirer son épingle du jeu.
Scénario : C'est les vacances pour tout le monde, et ce couple de
mouches ne déroge pas à la règle. Parti de ce constat, imaginer la façon par laquelle ces
diptères pourraient voyager est une idée fort sympathique. Ici, rien de potache, juste une situation ordinaire (ou presque) transposé dans un univers
d'insectes ponctué de touches d'humour (le GPS, la déduction etc.). Un développement drôlatique, auquel on reprochera une chute vite faite et peu subtile.
Jeu d'acteur : Les personnages, peu nombreux, sont ici bien campés dans l'ensemble. Un peu de surjeu au niveau du rôle féminin, et une diction un peu juste pour Cocs (reliée aussi à la technique), mais rien qui entache la qualité générale du mono.
Réalisation : Sans grande complexité, la réalisation est sobre et plutôt propre. Certains bruitages sonnent un peu cheap (ou déjà-vu), le pitch/stretch n'est pas tout à fait maîtrisé (nuisant à la compréhension, sur Cocs notamment), et le "personnage" féminin sature à quelques occasions. Cependant, la musique est appropriée (bis) et l'ensemble reste agréable à l'écoute.
Conclusion : Les deux comparses nous offrent une chouette participation au concours. Une idée originale, portée par une réalisation dont ils n'ont pas à en rougir. Faites-vos bagages, et envolez-vous avec eux.
______
>
Le tracé d'une vie, réalisé par Neo ThirstUn concours comme celui-ci prête la possibilité aux participants de tout niveau d'explorer différentes approches et idées vis-à-vis du thème. Cela aboutit souvent à de bonnes surprises, comme cet étrange rêve mis en son par Neo Thirst.
Scénario : La vie est une longue et sinueuse route avec ses carrefours, rond-points et autres intersections. Une excellente métaphore filée qui constitue la fondation de ce mono fort original. Une métaphore plutôt bavarde, aux dialogues parfois confus ou maladroits, mais au fond intéressant. Le message philosophique véhiculé est (trop ?) rapidement compris au fur et à mesure du développement qui se termine hélas par une fin quelque peu abrupte, oubliant ainsi d'impliquer un peu plus l'auditeur dans les enjeux.
Jeu d'acteur : Deux personnages principaux, deux acteurs. Un jeu fleurtant avec le surjeu et la lecture. Les deux voix peinent à rester crédibles en permanence, dû à un texte peu évident et à des répliques parfois peu naturelles. Dommage pour une production de ce genre où une majeure partie de la vraisemblance se trouve dans l'interprétation appliquée des acteurs.
Réalisation : Dans ce mono, si le fond est important, la forme l'est tout autant. Les voix sont propres, agréables, malgré les quelques petites saturations qui trainent et l'audible différence de qualité entre les deux protagonistes. Le montage est dynamique, mais on regrettera un manque de clareté dans la mise en scène et l'enchaînement des dialogues pas toujours évident (troublant la frontière entre off et non-off). Cependant, la mise en son est immersive, bien bruitée, et plutôt réussie.
Conclusion : Ce tracé d'une vie est la bonne surprise scénaristique du concours. Plus pertinent sur le fond que sur la forme, ce mono sait installer une ambiance pesante en outre-passant les quelques défauts qui le caractérisent. N'oubliez pas, la réponse à vos questions se trouve parfois dans le rétroviseur.
______
>
Le démon du bien qui voulait conquérir le monde, réalisé par SilverSonIl y a les créateurs, et puis il y a SilverSon. Tantôt minimaliste, tantôt original, tantôt les deux, souvent hors-norme. Il nous le prouve une fois de plus, avec cet OVNI au titre (il faut le dire) trop long.
Scénario : Joker. Il est fort difficile d'être cohérent en analysant ce texte qui n'a de réel intérêt que dans son absurdité. C'est n'importe quoi, et c'est tout simplement là que réside l'originalité de cette réalisation. On est en roue libre et on se laisse porter par le flot délirant ponctué pour une
double chute vu et revue. On aime ou on n'aime pas, on rit ou on ne rit pas.
Jeu d'acteur : Cela a beau être absurde, cela ne doit pas en être moins crédible. Ça bafouille un petit peu, c'est parfois mou, mais ça reste correct. Les acteurs font leur boulot, et on y croit (presque).
Réalisation : Il faut bien avouer que si le concept est barré, la technique laisse ici à désirer. Les voix ne sont pas assez travaillées (manque l'utilisation d'EQ, de reverbs), comme le démon qui est difficile à comprendre, même si cela reste propre. On subit des soucis de volume, les bruitages manquent de consistance et sont peu convaincants. La mise en son en reste à son strict minimum et c'est dommage. A noter également le choix du bitrate (128kbps) à l'export, n'arrangeant pas vraiment le rendu final.
Conclusion : Le démon du bien... est un mono qui ne se prend pas au sérieux, mais qui aurait peut-être dû. C'est regrettable quand on connaît les réalisations passées du compère, rarement en proie aux gros défauts. Reste ainsi un sketch, certes peu mémorable, mais qui en amusera sûrement plus d'un.
______
>
Pesanteur, réalisé par LorendilN'en déplaise aux blockbusters, on peut réaliser du très bon avec très peu.
MacGyver ne me dira pas le contraire, et Lorendil non plus. Démonstration avec cette
Pesanteur, histoire contemplative en monologue du concours.
Scénario : Un homme, ses réflexions, une voiture et la route. Tel est le postulat de départ de ce mono dont le principal fondement est son texte. L'auditeur ignore tout, et va devoir fouiller dans les pensées du personnage pour espérer y comprendre quelque chose. Si sur le papier cela sonne bien, cela l'est moins dans la pratique. On est face à une écriture plutôt réussie, très suggestive, se portant sur de la description plutôt que sur un quelconque dialogue. Cependant, celle-ci est en proie à quelques longueurs et à une chute manquant cruellement d'enjeu. Dépeindre un peu plus l'état psychologique du personnage et son environnement aurait été un plus non négligeable dans l'immersion de ce mono qui reste malgré tout bien écrit.
Jeu d'acteur : Qui dit monologue, dit une seule et unique voix. Ainsi, bien qu'elle échappe quelque peu à l'effet de lecture, elle manque d'entrain et de dynamisme. Là où le protagoniste devrait être stressé, nerveux et à l'affut, l'acteur reste calme et relativement passif. Une interprétation qui aurait pu être mieux travaillée, bien que cela ne gâche en rien l'expérience d'écoute.
Réalisation : Minimalisme est le maître mot. Un choix musical excellent, et une voix par-dessus qui aurait tout à gagner en clareté (épuration des basses via EQ) et en brillance. Même si cela fonctionne bien ainsi, un travail de design avec de petits détails sonores aurait pu renforcer grandement l'immersion et l'attention de l'auditeur : insert du moteur de la voiture, reverb de l'habitacle, voitures à contresens etc., le champ de création était large.
Conclusion : Une chouette réalisation minimaliste, qui laisse paraître un fort potentiel créatif malheureusement resté inexploité. Cependant, pas d'hésitation, prenez la place du mort et contemplez paisiblement ces trois minutes et cinquante-quatre secondes de paysage narratif.
______
>
L'examen, réalisé par Adelta et TonioPasser son permis n'est pas évident, mais est-il bon d'essayer de le passer avec Adelta et Tonio ? Libre à vous de décider, à vos risques et perils. Retour sur l'examen tordu de ce concours.
Scénario : Quand l'examinateur n'est pas l'image exemplaire que l'on s'en fait. Encore une fois, un classique revisité ici de façon loufoque, avec quelques bonnes idées, tout en restant dans quelque chose de conventionnel. Le tout terminé par une chute (
au sens littéral du terme) décevante, et (une fois de plus) déjà vue. De quoi malgré tout arracher quelques sourires à l'auditeur.
Jeu d'acteur : Côté voix, les interprètes sont impliqués mais restent globablement mous face à un texte parfois peu naturel, entraînant pas mal d'hésitations. Dans l'ensemble, comme la voiture, cela tient à peu près la route.
Réalisation : On a affaire ici à un ensemble de bonne facture. Les voix sont propres, le montage est dynamique bien que manquant de subtilité dans certains enchaînements (coupures, transitions etc.), les bruitages font leur boulot même si ça n'est pas d'un grand réalisme. On pourra éventuellement reprocher un manque de reverb, pouvant apporter un quelque chose en plus sur les voix.
Conclusion : Un sketch en demi-teinte, que ce soit à l'écrit ou à la technique, n'arborant que peu de vannes, excepté via l'exploitation des stéréotypes de ses personnages. Cela reste néanmoins sympathique à écouter. Une dernière chose : pas besoin de boucler votre ceinture, vous n'en aurez pas besoin.
______
>
On s’y brûle les ailes, réalisé par LestatvampNote bene : l'écoute de ce mono a été effectuée au casque stéréo, n'ayant pas accès à un système 5.1.C'est fou à quel point une simple image peut donner vie aux idées les plus vastes possibles. On part de rien, et on arrive à quelques chose qui dépasse les attentes. C'est le cas de ce mono au titre qu'
Icare n'aurait point volé pour sa propre biographie.
Scénario : Vous êtes-vous déjà imaginé un scénario catastrophe sur fond de vacances familiales en camping (ou l'inverse) ? Si oui, vous êtes sûrement Lestatvamp. Si non, ce n'est pas grave, on ne vous en voudra pas. Ce script narre une histoire ambitieuse, plus proche du prologue que du one-shot auto-suffisant. Ça démarre doucement, gentillement, sans réel but, pour terminer sur un retournement violent complètement inattendu, au goût de trop peu. Une idée intéressante malheureusement mal tournée pour ce type d'exercice.
Jeu d'acteur : Les acteurs sont ici de tous niveaux. Cela passe donc autant par un jeu correct et réussi (Coupie, très chouette, SilverSon et Thetchaff, involontairement drôles mais sympathiques à entendre), que par un jeu pauvre ou surjoué. Dommage, car cela créer des différences de tension dans les dialogues, détournant ainsi l'attention porté sur le texte par l'auditeur.
Réalisation : Tout d'abord, le format peu commun de 5.1. Après une simple écoute, son intérêt semble fortement réduit. Se contenter du format stéréo mp3 standard aurait été amplement suffisant et un meilleur choix pour débuter. Car on retrouve malheureusement ici beaucoup de défauts communs. Des problèmes de volume (dont de la forte saturation), une forte panoramique, des voix peu ou pas travaillées qui s'intègrent mal entre elles (corrigeable notamment à l'EQ) et des transitions très brusques. Ce qui rend l'ensemble tristement peu agréable à écouter, alors que l'effort a été mis sur le sound design. A défaut des ailes, on s'y brûle les oreilles, dommage.
Conclusion : Une réalisation pétrie de bonnes intentions, mais qui demanderait à être retravaillée tant sur le fond que sur la forme. Rien d'insurmontable, cela se corrige aisément. D'un point de vue écriture, c'est un script peu taillé pour ce type de concours, que l'on aurait voulu entendre de façon plus développée en tant que prologue d'une véritable série catastrophe. Avec du travail, cela pourrait donner quelque chose de très bon.
__________
Ces avis (souvent) tranchants et tranchés ne reflètent évidemment que mon point de vue personnel. Et puis, il fallait bien un grand méchant loup dans le lot. Comme déjà dit, c'est une belle édition, avec des réalisations de tout horizon bourrées de potentiel. Un grand bravo à tous les participants pour avoir relevé ce défi, pas si simple qu'il en a l'air !
Lorendil a écrit:
C'est marrant parce que vous vous contredisez sur certains points, ambiance, ton, scénario, je pense que ce mono est trop spécial pour qu'il y aie une pensée commune dessus.
Les goûts et les couleurs. Cela s'appelle avoir une appréciation et une vision des choses, tout simplement. Quand certains crient au génie, d'autre crient à l'infamie. S'ils étaient tous strictement du même avis, cela n'aurait aucun intérêt pour progresser.
On passe maintenant aux hors-concours !
>
Saint Julien de Concelles, réalisé par FrançoisTJPQue se passerait-il si les GPS étaient dotés d'un libre arbitre ? Une idée simple, mais furieusement efficace une fois mise entre les mains de FrançoisTJP. Trajet retour sur le mono le plus long de ce (hors-)concours.
Scénario : Sans surprise, l'ensemble du script se passe dans un véhicule transportant une robe, un GPS et un François. Deux de ces trois éléments vont converser. Un postulat de départ qui n'est pas sans rappeler l'émission de sketch
Direction Assistée d'Olivier Paulet. Une destination, et 1h de trajet de conversation, exploitant très bien la relation entre l'homme et la machine. Drôle, hilarant par moment, tout en amenant une critique malsaine de la situation. On pourrait reprocher quelques maladresses de dialogues, mais ce serait du simple chipotage. Pas de quoi bouder son plaisir.
Jeu d'acteur : Indéniablement, le GPS est un acteur à part entière. La "complicité" entre François et son gadget est excellente. Cela respire le naturel, les dialogues sont dynamiques, et les émotions sont là.
Réalisation : Côté voix, c'est propre et clair, que ce soit le GPS ou le personnage. Côté ambiance, on peut trouver un manque de petits détails en plus histoire de rendre le trajet plus vivant : variations de moteur, Lise en filtrée au téléphone, bruits d'habitacle et voitures qui passent etc. mais le reste nous fait rapidement oublier la boucle de route en fond. Le montage est rythmé, dynamique, sans creux. Difficile d'en trouver plus à redire, c'est excellent.
Conclusion : Une histoire maîtrisée de bout en bout. Un vrai plaisir d'écoute drôle et inquiétant à la fois. Un seul regret : c'est hors-concours. A déguster sans modération. Méfiez-vous, la prochaine fois que vous utiliserez un GPS en vous rendant à votre mariage.
______
>
[Mono sans nom], réalisé par StewolfIl ne fait pas bon d'être policier dans ce concours, et Stewolf vous le montre dans ce polar sans nom. Rapport d'enquête du mono le plus hors-concours de ce hors-concours.
Scénario : Confus. C'est ainsi que l'on pourrait résumer le déroulement de ce drame. Si le début est assez linéaire et compréhensible malgré les incohérences, la troisième partie de l'intrigue nous prend à contre-pied et nous perd dans un dénouement abscons. On ne cerne pas le comportement du personnage principal, et on reste ainsi sur une sensation d'incompréhension. Ce qui est fort dommage...
Jeu d'acteur : Sur l'ensemble des dialogues, on ressent un manque de motivation dans les voix malgré l'envie de bien faire. On se retrouve donc face à des dialogues mous, manquant d'implication, donnant un résultat terne à l'ensemble des échanges. C'est sur la bonne voie.
Réalisation : Il y a dans ce mono beaucoup de situations, et le rythme n'y est malheureusement pas. La faute à des dialogues pas assez concentrés (blancs de réponse trop longs), et à un montage assez creux malgré l'effort de mise en scène. Le choix des bruitages et leur intégration manque de finesse, les voix et la prise de son sont à retravailler (à l'EQ, pour commencer) pour obtenir un rendu plus homogène, les volumes également (lors du mixage, et compression sur rendu final). Seule la musique colle bien à l'action sans problème. C'est un bon début, mais il y a encore du travail à apporter.
Conclusion : Il y a des choses bonnes, d'autres moins, mais cela présage d'une progression à venir. Cela reste malgré tout un mono agréable à l'écoute et plein de potentiel. Affaire classée ? Pas si sûr...
__________
Ainsi s'achève ce pavé-review de cette édition. Bravo pour les petits malins qui le liront du début à la fin.