Un autre titre pour ce topic pourrait être :
Pourquoi est-il préférable d'avoir un blaster à protons plutôt qu'une épée vorpale ?
Il y a quelques jours, je réécoutais
La prophétie d’Almoria, une saga d’heroic fantasy qui s’est arrêtée au bout de deux épisodes, faute d’avoir trouvé des acteurs, et vraisemblablement son public. A l’écoute, si la qualité du mixage et du jeu d’acteur est correcte, le scénario repompe encore une fois le schéma éculé groupe/objet mythique/quête/méchant maléfique (oui, je suis un peu gonflé d’écrire ça après ce que j’ai dit dans
mon dernier article dans MagP3). Mais après tout, si pendant dix ans la recette avait marché, pourquoi la sauce n’a-t-elle pas pris cette fois ?
Mon petit test part de l’impression (donc un truc complètement empirique, si vous avez des choses à redire ce sera sur la suite) d’une sorte de désintérêt général et récent pour le genre de l’heroic fantasy. Mais ce schéma peut être appliqué à l’ensemble des genres. Je me suis donc dit qu’il pouvait être possible d’illustrer des tendances dans les genres à succès. J'ai alors fait une petite expérience dont je vous propose les résultats dans ce qui va suivre.
/i\ Ici je vais décrire la méthode employée, ce qui est nécessaire mais pas forcément très intéressant. Si vous avez peur d'être barbé, je vous encourage à passer au paragraphe suivant.Pour ce test, je me suis basé sur la liste des sagas mp3 de Netophonix. Pour mesurer le succès d’une saga, j’ai utilisé le nombre de bravos attribués qui, s’il est souvent critiqué pour juger de la qualité, me semble assez fiable dans le cas présent. On peut aussi argumenter sur le fait que Netophonix n’est pas la sagasphère (coucou KMP), mais je ne voyais pas d’autre outil aussi fiable et complet que celui-ci. J’ai donc fait la liste des 100 premières sagas (enfin, 97 car il me manquait des informations pour 3 d’entre elles) par nombre de bravos, en y ajoutant le genre et la date de création. J’ai dénombré 11 genres (Science-fiction, Heroic fantasy, Parodie de jeu, Aventure, Groupement de mono, Parodie de film, Fantastique, Contemporain, Thriller, Action et Autre), j’ai dû créer la catégorie « Contemporain » pour ne pas multiplier les catégories et ne pas faire grossir la catégorie artificielle « Autre ». Je n’ai pas fait de distinction entre les sagas humoristiques et sérieuses, car la frontière est parfois floue. J’ai utilisé la date de création car j’ai considéré que c’était à son démarrage qu’une saga était la plus influencée par les tendances du moment et surtout qu’elle jouait le plus sa réussite, et qu’elle représentait donc bien les goûts d’une époque. Je me suis basé cette fois sur les informations du Netowiki, et c’est là que j’ai manqué d’informations, d’où les 97 sagas au lieu de 100.
Histoire d’avoir un point de comparaison, j’ai commencé par représenter la proportion de chacun des genres parmi ces 100 sagas.
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On voit clairement que 3 genres sortent du lot : la science-fiction, l’heroic fantasy et les parodies de jeu vidéo (quasiment 50% des sagas à elles seules). Si on s’arrête à ce test, la proposition sur l’essoufflement des sagas d’heroic fantasy est clairement fausse. Mais que se passe-t-il lorsqu’on répartit ces sagas par année de création ?
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Ici, les résultats deviennent plus intéressants. On observe des fluctuations, avec des années fastes selon les genres, une explosion du nombre de genres durant la période 2007-2010, jusqu’en 2011, où la science-fiction est la seule a s’en être sortie et où, pour la première fois en 11 ans, l’heroic fantasy n’est pas présente. Le graphique s’arrête en 2011, vraisemblablement parce que les sagas de 2012 et 2013 n’ont pas encore remporté assez de succès.
Cette distribution peut être amenée à changer en fonction des épisodes qui sortiront et qui pourront relancer l’intérêt pour une saga absente du top 100 actuel. Néanmoins, les succès les plus récents tendent à montrer que la science-fiction conserve un pouvoir attractif que l’heroic fantasy ou les parodies de jeux vidéo on progressivement perdu. Si on considère que cette distribution est le résultat des goûts changeant des auditeurs, on expliquer la réussite de la SF par la plus grande liberté que proposerait ce genre par rapport aux deux précédents (l’heroic fantasy qui a du mal à s’extirper de la construction
SOCQATOA et les parodies de jeux dominées par Final Fantasy et Metal Gear Solid), ce qui limiterait les redondances.
Bien entendu, on peut formuler un certain nombre de critiques envers le raisonnement précédent :
- le nombre de sagas étudiées : en effet, si 100 sagas peut sembler être un chiffre suffisamment élevé qu’il soit représentatif des tendances générales, dès qu’on répartie les sagas par années, le nombre chute drastiquement et pas de manière équitable. Ainsi, les sagas populaires sorties en 2011 sont au nombre de 2 : difficile de tirer un résultat solide sur un si petit échantillon. Pour ce point-ci, nous somme devant un problème insoluble : soit on accepte le manque de fiabilité, sois on augmente le nombre de sagas étudiées, mais ces nouvelles sagas peuvent-elles être considérées comme ayant remporté suffisamment de succès (en effet, ce critère implique qu’on ne s’intéresse qu’à un petit échantillon, toutes les sagas ne peuvent pas être à succès) ?
En effet, le graphique précédent peut être trompeur puisqu’il représente des proportions et pas des quantités. Jetez un œil ci-dessous au nombre de sagas à succès par années et par genre, vous verrez que c’est loin d’être uniforme.
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- le temps d’existence des sagas mp3 : comment des tendances pourraient-elles apparaître après seulement 13 ans d’existence ? Et surtout 11 tendances différentes ! Peut-être faudrait-il plutôt étudier des catégories plus larges et moins nombreuses, qui elles se seraient vraiment affirmée au cours de la dernière décennie. Mais cela demande un travail plus important et prenant que celui-ci qui demandait simplement de recopier des données déjà à disposition.
- l’offre et la demande : si 1000 sagas d’un genre donné sont diffusées dans l’année et 10 d’un autre dans le même temps, il est fort probable que le nombre de sagas qui réussiront à trouver leur public soit plus élevé pour le premier genre. Or, les données ci-dessus ne prennent absolument pas en compte ce rapport sagas populaires/sagas sorties. Il faudrait pour cela faire un test en listant toutes les sorties d’épisodes chaque année. Ce pourrait même être un outil de mesure plus fiable pour mesurer le succès d’un genre : regarder la distribution par genre pour tous les épisodes sortis. Mais cela demanderait un travail titanesque totalement impossible à réaliser.
Mais pourquoi faire tout ce travail (bon, ça m’a pris 2 heures de l’idée à la publication en passant par le comptage) si c’est pour le descendre dans le paragraphe suivant ? Déjà parce que c’est bien de faire de l’autocritique, mais aussi parce que je pense qu’il est malgré tout intéressant de voir que la sagasphère fluctue et n’est pas monolithique dans ses choix. Et comme Kak l’avait fait remarquer lors d’
une précédente publication de stats inutiles, au-delà des critiques qu’on peut faire sur la méthode, parfois la statistique en elle-même est amusante. Je vous laisse en juger.
Edit : Rétablissement des images.